«Être simplement rentable ne suffit plus»

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Être simplement rentable ne suffit plus

Les entreprises n’ont pas qu’un rôle économique : elles portent également une responsabilité sociale, pour l’environnement et leurs collaborateurs.
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Pendant la conférence sur le climat de Paris, BNP Paribas Fortis a organisé début décembre à Bruxelles une journée d’expertise consacrée à l’investissement socialement responsable (ISR). Quelques 360 participants ont assisté aux présentations et aux débats, alors qu’un millier de personnes supplémentaires en Belgique et à l’étranger suivaient l’événement en direct par streaming.

«Aujourd’hui, l’IRS n’est plus une manœuvre opportuniste. C’est totalement une question d’engagement», a d’emblée affirmé Peter Vandekerckhove, CEO de Retail, Enterprise & Private Banking. «Nous sommes ici parce que nous sommes conscients que certaines choses doivent – et heureusement peuvent – changer.» Plusieurs dirigeants d’entreprises l’ont confirmé. Parmi eux, Marc du Bois, CEO du groupe des eaux minérales naturelles Spadel, connu pour les marques Spa et Bru. Il a expliqué l’importance qu’attachait son entreprise au développement durable. En 1967, Spadel s’est par exemple engagée avec la Gestion des Eaux et Forêts de la Région wallonne. «C’est ainsi qu’ont été prises des mesures environnementales importantes dans la région de nos sources, à Spa, qui ont permis qu’aujourd’hui plus aucune activité industrielle ni agricole ne s’organise à proximité. Cela favorise la qualité de l’environnement et donc de nos eaux naturelles.»

Le travail n’est certainement pas terminé, souligne Marc du Bois. «Nous voulons atteindre la neutralité carbonne en 2020, et nous voulons même obtenir une empreinte positive en 2039. À partir de l’an prochain, tous nos produits seront naturels ou produits à 100% à partir d’ingrédients naturels. Cela signifie notamment que nous n’utiliserons plus de conservateurs.»

Nous voulons atteindre la neutralité carbonne en 2020, et même obtenir une empreinte positive en 2039.

– Marc du Bois, CEO Spadel

Médicaments à base de plantes

Chez Tilman aussi, le lien avec l’environnement est rapidement établi. Cette entreprise luxembourgeoise de 150 salariés développe des médicaments à base d’extraits de plantes. «La qualité et la protection de l’environnement sont une priorité absolue pour nous», explique le CEO Jean-Noël Tilman. «Comme nous travaillons avec des matières premières naturelles, notre processus de production est très peu polluant. Mais nous agissons aussi dans d’autres domaines, comme la sélection de nos fournisseurs. Nous avons également renoncé à utiliser certaines plantes parce qu’elles constituaient une menace pour la biodiversité.» Jean-Noël Tilman privilégie les formes d’énergie durables, avec des panneaux photovoltaïques et des véhicules qui roulent au LPG. «En outre, nous incitons nos employés à travailler régulièrement depuis leur domicile», explique le CEO. «C’est une autre manière pour nous de réduire les émissions de CO2 .»

Pour une entreprise comme WDP, leader sur le marché du développement et de la location d’immobilier logistique dans le Benelux, le transport est inévitable. L’entreprise déploie cependant de nombreux efforts pour le limiter et en accroître l’efficacité, explique le CEO Joost Uwents. «Nous proposons à nos clients des technologies innovantes ainsi que de nou- velles manières de travailler.»

L’entreprise évite de consommer de l’énergie ou réduit sa consommation chaque fois que c’est possible. «Dans nos entrepôts, nous pouvons par exemple recourir à de nouveaux sys- tèmes d’éclairage et de chauffage», explique Joost Uwents. «Et sur un horizon de 40 ans, un investissement dans l’isolation est rapidement amorti. De plus, il réduit considérablement le prix de revient pour le client.»

Les panneaux solaires sont un autre exemple. «Une solution durable, qui profite à la fois à nos clients et à nos actionnaires», poursuit Joost Uwents. «Les premiers disposent d’une énergie verte, les seconds profitent du fait que nous pouvons rentabiliser non seulement la surface au sol, mais aussi les toitures.» L’étape suivante consiste à consommer localement cette énergie verte, souligne-t-il encore. «Nous étudions les possibilités dans ce domaine avec le client. L’une d’entre elles est le chargement des voitures électriques.»

Joost Uwents entrevoit également un solide potentiel en dehors des murs des entrepôts, notamment dans la multimodalité. «Dans ce cadre, nous recherchons de nouveaux sites compatibles avec différents modes de transport : routes, chemins de fer et voies navigables. Dans le port de Gand, nous construisons actuellement un entrepôt de plus de 20.000 m2 pour Distrilog Group sur le Kluizendok.»

 

Nous recherchons de nouveaux sites compatibles avec différents modes de transport : routes, chemins de fer et voies navigables.

– Joost Uwents, CEO WDP

Bonheur

La durabilité ne se résume pas à l’écologie, mais comprend également les relations sociales. «Une entreprise doit naturellement être rentable pour survivre, mais si elle n’était que rentable, ce serait regrettable», remarque Jean-Noël Tilman. «Nous voulons contribuer au bonheur. Pour nos travailleurs, cela signifie qu’ils bénéficient d’une grande confiance. Par exemple, nous contrôlons la qualité du travail, mais pas les heures prestées. Et personne n’abuse de ce système. Nos travailleurs disposent également d’une grande autonomie, ce qui leur permet de prendre des risques et des initiatives. Il arrive qu’ils commettent des erreurs, mais si vous ne les acceptez pas, votre entreprise ne progresse pas.»

«Une entreprise socialement responsable signifie aussi que les travailleurs incitent de plus en plus leur employeur à s’engager en faveur de la société», embraie Michel Eeckhout, président de Goods2Give. Cette plateforme logistique en ligne récolte des produits non-food invendus auprès d’entreprises comme Procter & Gamble et les redistribue à des organisations qui luttent contre la pauvreté et l’exclusion sociale, comme des CPAS et des ASBL. Cette année, Goods2Give a ainsi pu aider 130.000 personnes en redistribuant pour 2,5 millions d’euros de produits.

Ces témoignages d’entrepreneurs illustrent que la durabilité est un travail sur mesure, et qu’elle doit bénéficier d’un large support. «Vous ne pouvez pas imposer la durabilité, vous devez la faire vivre dans l’entreprise», résumait très bien Marc du Bois. «Elle ne se traduit pas toujours par de grandes révolutions», a poursuivi Joost Uwents. «Je conseillerais aux entreprises d’essayer, tout simplement, étape par étape. On crée ainsi une atmosphère qui permet d’emporter progressivement l’adhésion de chacun en faveur de la durabilité.»

Echo connect – 12 décembre 2015

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