Tilman est l’Entreprise de l’année 2013

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Tilman est l’Entreprise de l’année 2013

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©Dries Luyten

Le groupe Tilman, premier laboratoire de phytothérapie en Belgique a remporté
le titre d’Entreprise de l’année. Entretien avec le CEO, Jean-Noël Tilman.

Tilman, le premier laboratoire de phytothérapie (soins par les plantes) en Belgique, est l’Entreprise de l’année 2013, une initiative d’EY en collaboration avec L’Echo et BNP Paribas Fortis. Cette PME familiale, née à la fin des années 40 dans l’arrière-boutique d’une pharmacie, emploie aujourd’hui 105 personnes et peut se targuer d’une croissance annuelle de 15%. Le point avec Jean-Noël Tilman, le CEO de la société du même nom.

La phytothérapie a le vent en poupe, mais pas mal d’entreprises du secteur sont des étoiles filantes. Tilman tient depuis 1947. Qu’est-ce qui fait votre spécificité?

Nous sommes un laboratoire pharmaceutique, ce qui n’est pas le cas de toutes les entreprises du secteur. Je suis pharmacien, et je suis entouré par six pharmaciens… Nous faisons du médicament enregistré plutôt que du complément alimentaire, ce qui garantit notre sérieux et notre pérennité. Nous sommes reconnus par les médecins et les pharmaciens comme le labo le plus spécialisé en phytothérapie.

Quelle est votre part de marché?

Nous détenons à peu près 50% du marché belge si on restreint le secteur à la vraie phytothérapie, soit les produits à base de plantes vendus en pharmacie, médicament ou non.

Comment s’est développée votre entreprise?

À la fin des années quarante, mon père, pharmacien, a commencé à développer les Tisanes Ardennaises à l’arrière de son officine. Au milieu des années 80, cette activité occupait six personnes, tandis que l’officine en employait huit. La production de tisanes était donc une petite annexe qu’il avait tendance à délaisser. Je suis arrivé en 85, avec l’ambition de développer l’entreprise pour qu’elle devienne exactement ce qu’elle est aujourd’hui. J’ai réalisé mon rêve. J’ai développé les tisanes existantes. Sans aide, et sans délégué commercial. On n’avait rien. Petit à petit, nous avons créé de nouveaux produits, exportés un peu et engagé des collaborateurs. Grâce à notre expansion en 1997, nous avons pu enfin emprunter pour construire notre usine de Marche-en-Famenne. Nous avons généré à partir de là une croissance totale de 15% par an, qui se maintient depuis lors. Aujourd’hui, nous sommes 105 personnes et nous générons un chiffre d’affaires entre 19 et 20 millions d’euros.

Quelle est la part de vos exportations?

Cette année, nous prévoyons de réaliser 23% de notre chiffre d’affaires à l’exportation. Cela correspond à la moitié de nos volumes, car nos partenaires à l’étranger prennent leurs marges.

Quelle est votre stratégie de développement?

Innover et enregistrer de nouveaux produits, en Belgique et dans d’autres pays européens. Dans 10 à 15 ans, nous devrions faire 80% de notre chiffre d’affaires en dehors de la Belgique. Nous voulons continuer à grandir. Nous voulons être le meilleur à l’étranger, comme nous le sommes déjà en Belgique.

Qui sont vos concurrents?

Toute l’industrie pharmaceutique, quelque part, est en concurrence avec nous. Le Motilium de Johnson & Johnson, par exemple, est en concurrence avec le Laxafytol, un médicament à base de gingembre qui vaut la dompéridone.

Pourquoi les gens vont-ils vers la phytothérapie?

Parce que dans certains cas, on peut se soigner avec des plantes, tout en subissant moins d’effets indésirables. Une grande partie du public cherche des solutions douces.

L’efficacité de vos produits est-elle prouvée?

Avec les tisanes, on se base sur la tradition qui apporte son efficacité. Ces plantes ne seraient plus utilisées dans le cas contraire. Pour les médicaments, c’est autre chose. Nous faisons des études cliniques pour en prouver l’efficacité.

Quels sont vos « best-sellers »?

Le Sedistress, pour détendre et faciliter le sommeil. Le Flexofytol, un anti-inflammatoire à base d’extrait de curcuma, et le Cholesfytol, un traitement contre le cholestérol à base de levure rouge de riz aussi efficace que les statines chimiques, mais sans les effets indésirables. En unités, ce qu’on vend le plus, c’est le sirop Thymoseptine, au thym, un produit qui a déjà vingt ans. C’est le sixième sirop vendu en Belgique, à côté des grandes marques.

Combien investissez-vous dans la R & D?

750.000 euros par an. C’est un choix stratégique fondamental qui nous permet de faire la différence par rapport à nos concurrents.

Vous comptez encore croître?

Oui. Nous voulons grandir, et encore grandir. Nous avons du terrain qui nous permettra de nous étendre. Nous pouvons multiplier notre surface par cinq pour répondre aux besoins. Nous misons aussi beaucoup sur l’international. La France, l’Espagne et l’Italie sont nos trois marchés de prédilection.

Préparez-vous des acquisitions?

Oui. Notre croissance passera par des acquisitions à l’étranger. Nous visons des entreprises qui ont une force de vente et sont correctement implantées dans leur pays. Des petites sociétés qui font entre 5 et 50 millions de chiffre d’affaires. Tout dépend du moment.

Avez-vous déjà été abordé par de plus grandes entreprises pharmaceutiques?

Nous avons eu des propositions, Omega Pharma nous a abordés. Mais nous ne sommes pas à vendre. Et nous ne le serons jamais. Parce que j’ai un fils, qui est pharmacien et va commencer à travailler. Et parce qu’on peut m’offrir énormément d’argent, mais je dirai non. J’ai assez d’argent pour vivre, et cela me suffit.

Même pas d’entrée en Bourse?

Certainement pas. Je préfère ralentir la croissance et rester autonome. Je tiens beaucoup à la dimension familiale de l’entreprise. Cela rend les choses plus sympathiques et agréables. Ici, tout le monde se parle et il n’y a pas de serrures aux portes.

Vous avez bien traversé la crise?

Oui et non. Nous avons continué à faire de la croissance, mais nos fournisseurs voulaient être payés plus vite et nos clients tardaient. Nous avons connu un différentiel de 700.000 euros en besoin de fonds de roulement. Nous avons obtenu des avances à court terme des banques. Mais nous avons dû faire un plan d’économies et licencier cinq personnes. Le côté positif, c’est que depuis lors, nous sommes rentables. Ce qui prouve que la crise a du bon.

Vous affirmez que le développement durable fait partie intégrante de votre entreprise…

L’environnement m’intéresse, parce que j’aime la nature, qui me fournit mes matières premières. Et puis, pour moi, gagner de l’argent sans avoir l’ambition de créer du bonheur, de contribuer au bien-être de l’humanité, c’est triste. Pour donner un sens à ce qu’on fait, il faut laisser une trace autre que financière.

En quoi cette logique permet-elle de mieux se défendre au plan économique?

Cela attire la clientèle, nous vendons mieux, mais surtout, cela motive les gens qui travaillent dans l’entreprise. Enfin, c’est hyper-stratégique: la terre se réchauffe, on ne le vit pas encore au quotidien, mais les conditions de vie vont changer. Les comportements des consommateurs vont changer. Ils exigeront que les entreprises soient socialement responsables. Les autres seront sanctionnées.


Vincent Georis

pour L’Echo – 7 Octobre 2013

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